Beatriz Preciado, née à Burgos en 1970, est une célèbre philosophe et chercheuse de la théorie du genre influencée par les idées de Michel Foucault. Elle a obtenu son doctorat à la Princeton University, université qui lui a attribué la mention d’honneur à la fin de ses études, et où elle continue à travailler de nos jours en tant que chercheuse. Dans les années qui suivirent son doctorat, elle a également obtenu un Master en Philosophie Contemporaine et Théorie du Genre dans la New School for Social Research de New York. Agnes Héller y Jacques Derrida se trouvent entre ses professeurs.
Actuellement, Beatriz Preciado est professeur à l’Université de Paris VIII, où elle enseigne l’”Histoire politique du corps”, la “Théorie du genre” et l’”Histoire de la performance”. Elle a participé dans de nombreux forums internationaux, séminaires et conférences à propos de l’identité du genre et des modes de subjectivation et son livre “Manifeste contre-sexuel” (publié en 2002 par Opera Prima) est aujourd’hui une des plus grandes références théoriques de la théorie queer.
“Testo Junkie” (publié en 2008) se trouve aussi parmi ses œuvres, il s’agit d’une “expérimentation farmaco-pornographique” dans laquelle l’auteur s’est administré de la testostérone et a observé les effets de la substance sur son corps. Comme elle même le définit, “Ce livre n’est pas une auto-fiction”. Il s’agit d’un protocole d’intoxication volontaire à base de testostérone synthétique [...]. C’est un essai corporel, une fiction auto-politique ou une auto-théorie”. Un essai provocateur et une démonstration très réussie du lieu qu’occupent le sexe, le genre et le corps dans la contemporanéité.
“Je ne suis ni homme, ni femme, ni hétérosexuelle, ni homosexuelle, ni transsexuelle” déclare cette brillante philosophe et essayiste, qui en avril 2002 a été finaliste d’un Prix Anagrama de Ensayo en sa XXXVIII édition, avec l’œuvre “Porno-utopie, Architecture et sexualité dans Playboy pendant la guerre froide”. Dans ce livre elle expose une suggestive analyse de la revue Playboy (et de son père fondateur Hugo Hefner) pas tant comme à partir de l’érotisme des photos de filles plus ou moins nues, mais plutôt comme un projet architectonique et médiatique plus ample dont l’objectif était le déplacement de la maison hétérosexuelle et de ses codes établis de consommation et reproduction, en proposant comme alternative un nouvel espace destiné à la production de plaisir, capital dans les murs domestiques.
Des extraits du livre repris du site de Foleffet en 2008 :
Extrait du chapitre "Testo trafic", p184.
" La féminité se dévalue deux fois plus vite que la masculinité. Autrement dit, une femme (bio ou techno) de quarante-cinq ans sort du marché hétérosexuel alors qu’un homme peut atteindre soixante-cinq ans avant de devenir obsolète. Pour calculer l’âge réel d’une femme dans l’économie hétérocapitaliste, il faut lui ajouter quinze ans, afin de la rapprocher de son équivalent masculin, puis lui soustraire deux années pour chaque supplément de beauté ( taille des seins, minceur, longueur et épaisseur des cheveux, etc.) et en ajouter deux pour chaque handicap social (divorce, nombre d’enfants : chacun compte deux ans de plus, chômage, etc.). Prenons un exemple : Julie a trente-deux ans, c’est une bio-femme divorcée avec un enfant à charge, elle se tient en forme, fait du yoga, elle est jolie mais n’a pas un corps parfait, elle est mince et travaille dans une compagnie d’assurances : 32+15+2+2-2-2-2=45. C’est la dure réalité. Elle devra cesser de croire qu’elle est une fraiche créature de trente-deux ans, parce que son âge réel, dans l’économie hétérocapitaliste, est de quarante-cinq ans. Bye bye, Julie. Une autre possibilité serait de passer sur le marché de l’économie lesbienne parallèle, où l’âge réel diminue prodigieusement. Une femme qui, dans l’économie hétérocapitaliste, a atteint les 45 ans, peut réintégrer le marché lesbien avec un statut quasiment adolescent. Bingo."
Extrait du chapitre "chiennes alpha", p.83-84 de la présente édition.
"Depuis l’enfance je possède une bite fantasmatique d’ouvrier. Je réagis à tous les culs que je vois bouger. Peu m’importe que ce soit un cul de minette ou de maman, de bourgeoise ou de paysanne, de pédé, de nonne, de lesbienne ou de salope. La réponse est immédiate dans mon sexe cérébral. Toutes les filles, les plus belles, les plus hétérosexuelles, celles qui attendent le prince charmant plein de testostérone naturelle, sont en réalité destinées, à leur insu, à devenir des chiennes pénétrées par mes godes. Jusqu’à l’âge de douze ans j’étudie dans un collège catholique non mixte. Un vrai paradis lesbien. Les meilleures petites sont pour moi. Avant même d’avoir eu le temps de traverser la rue pour rencontrer les garçons du collège d’en face, elles ont déjà mis la langue dans ma bouche. Elles sont miennes. Je dois pourtant préciser que cette gravitation de la gent féminine autour de moi n’est pas due à ma beauté. A quatre ans on me diagnostique une déformation maxillo-faciale qui s’accentuera radicalement pendant mon adolescence, jusqu’à devenir grotesque. Avec les années je deviens un monstre myope au menton prononcé, aux bras et aux jambes trop longs et dramatiquement maigres. Mais pendant une bonne partie de mon enfance et de mon adolescence, sans doute grâce à quelque secret inconnu, les filles se sentent attirées par moi. Elles disent qu’elles ne sont pas lesbiennes, se lamentent, elles pleurent après s’être laissé tripoter les seins, elles ôtent leur culotte dans ma chambre et puis arrêtent de me parler, elles me dénoncent aux professeurs après s’être enfermées dans les toilettes avec moi en me demandant de leur raconter des histoires cochonnes. Mais elles gardent les lettres que je leur envoie, elles collectionnent les petits carreaux de céramique où j’écris leur nom au feutre rose. Elles se battent comme des guerrières possédées pour accaparer mon attention dans la cour de récréation. Elles sont à moi. Marquées pour toujours au feu de la Révolution."
*Merci à Foleffet et Dirty Week End qui m'ont données envie de parler d'elle !
c'est quoi son délire sur les ouvriers? Primate certes mais je maîtrise mes pulsions(de plus en plus avec l'âge c'est marrant)
RépondreSupprimerBzzz...
@ Bourdon : tu sais Preciado c'est du lourd dans la planète queer! Heureusement il y en a qui se soigne comme toi ! Faut pas forcément te sentir viser en tant qu'homme et ouvrier dans cette société "hétérocapitaliste" !!! lol !
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